RDC: l'ONG Avocats sans frontières dresse un tableau accablant des prisons
13/04/2016
Dans la prison de Makala à Kinshasa, le taux de
surpopulation carcérale est de 500% selon l'ONG
Avocats sans frontières.
Les conditions de détention dans les prisons de la République démocratique du Congo sont indignes et les geôles du pays sont le lieu d'une vaste palette d'abus. C'est le constat de l'ONG Avocats sans frontières qui a pu visiter plusieurs prisons du pays, et mener des entretiens approfondis avec des douzaines de prisonniers.
L'ONG Avocats sans frontières s'alarme de la vétusté des équipements en sous-effectifs. Les autorités carcérales, a constaté l'ONG, délèguent de nombreuses responsabilités, comme l'accueil des nouveaux prisonniers, la distribution de nourriture ou la prévention des évasions, à des auxiliaires qui sont désignés parmi les détenus.
Or ceux-ci se livreraient souvent à des extorsions comme l'explique Bruno Langhendries, membre d'Avocats sans frontières, joint par RFI à Bruxelles. « Un chef va être choisi parmi les détenus qui s’appelle le 'capita général' et qui va être nommé par le directeur de la prison. Ce 'capita' est une personne qui est condamnée à des peines de prison, en général très graves. Donc c’est une personne qui nourrit via la violence une autorité naturelle – entre guillemets – parmi les détenus, qui va choisir son équipe.
Un système «autorégulé entre détenus»
Dans son équipe, certains détenus auront des fonctions de sécurité, d’autres vont gérer les corvées qui sont exigées, d’autres également le passage d’un endroit à l’autre… Et donc cette équipe de détenus va réguler en réalité la vie entre les murs de la prison, sans quasi interférence avec le directeur et l’équipe de gardiennage officielle.
Le système ne permet pas suffisamment de gardiens et donc entre les murs le système est autorégulé entre détenus et donc ces discriminations se poursuivent. Cette marchandisation du détenu se poursuit entre les murs de la prison ».
Surpopulation carcérale
L'ONG Avocats sans frontières s'alarme par ailleurs de la surpopulation carcérale et dénonce des pavillons où des détenus s'entassent à raison d'un demi mètre carré par prisonnier, sans accès à des blocs sanitaires durant la nuit. Cette surpopulation carcérale est largement liée à un recours excessif à la détention préventive, dans certaines prisons jusqu'à 80% des détenus sont en attente d'être jugés.
« Le taux de surpopulation carcérale, par exemple à la prison de Makala à Kinshasa qui est la principale prison du pays, vient d’atteindre maintenant 500 % du taux d’occupation de la prison, ce qui est extrêmement élevé, et dans cette prison 74 % de la population carcérale est en attente d’un jugement, poursuit Bruno Langhendries.
Toutes ces personnes qui sont en attente d’un jugement sont présumées innocentes et donc ici il y a une sérieuse atteinte au droit à la liberté personnelle, qui est un droit fondamental reconnu par divers standards internationaux.
Les suspects livrés à des «intérêts» marchands
Et puis là où c’est fâcheux, c’est qu’il y a un détournement, en réalité, de la loi telle qu’elle est bien écrite finalement, en République démocratique du Congo. On constate un détournement de cette mesure au profit d’intérêts privés.
Que ces personnes soient policiers, qu’ils soient magistrats, qu’ils soient avocats, qu’ils soient greffiers, qu’ils soient de l’administration pénitentiaire… Tout le monde a un intérêt éventuellement marchand, au détriment des personnes suspectées. Donc l’ensemble de ces mécanismes, finalement illustre tout un système de délitement en réalité de l’appareil judiciaire ».
RFI
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