Thursday, 8 October 2015

Droits humains : Thambwe s’oppose à la désignation d’un "Expert indépendant"

Droits humains : Thambwe s’oppose à la désignation d’un "Expert indépendant"  



       Le ministre congolais de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba  
    
Participant à une réunion de la Commission des droits de l’Homme des Nations unies à Genève au cours de la semaine dernière, le ministre Alexis Thambwe Mwamba s’est opposé à la désignation d’un Expert indépendant, autrement dit un "rapporteur spécial", des Nations unies chargé de suivre l’état des droits de l’Homme au Congo-Kinshasa. Au motif que les droits humains présenteraient des améliorations. 
                 
A Genève, le ministre de la Justice Alexis Thambwe Mwamba s’est battu comme un beau diable pour faire échec à la désignation d’un "Expert indépendant" chargé de jouer le rôle de "surveillant" des Nations Unies pour les droits de l’Homme au Congo démocratique.

A l’appui de sa thèse, Thambwe a prétendu que les droits et libertés ont connu des "améliorations". L’objectif est atteint : grâce au vote négatif du groupe des "77", les Nations unies n’enverront pas de rapporteur spécial au Congo de "Joseph Kabila". La délégation congolaise à Genève a, sans doute, sablé du champagne. "Joseph Kabila", mêmement.

La détention est devenue la règle...

Et pourtant, Alexis Thambwe n’a pas dit la vérité à la Commission des droits de l’Homme. N’en déplaise à ce ministre qui a milité jadis dans le mouvement rebelle pro-rwandais du RCD - au nom, disait-il, de la démocratie et du respect des droits humains -, il n’y a aucune embellie au Congo de "Joseph Kabila". Bien au contraire. Les violations des droits humains sont banalisées au point que la détention est devenue la règle, la liberté l’exception.

Sous le titre "Bienvenue dans l’enfer de Makala", l’hebdomadaire "Jeune Afrique" publie dans son édition n°2855 datéé du 27 septembre au 3 octobre 2015 une enquête, réalisé par Trésor Kibangula, sur la plus grande prison de l’ex-Zaïre. Conçue par le pouvoir colonial pour 1500 pensionnaires, celle-ci héberge actuellement près de 7000 détenus dans des conditions d’hygiène qui heurtent l’humanité.

L’envoyé spécial de ce magazine parisien a eu à constater ce que d’autres observateurs ont fait avant lui. A savoir que la plupart des prisonniers sont enfermés depuis plusieurs mois sans avoir été entendus par un magistrat. Légalement, la garde à vue ne peut dépasser 48 heures.

Plusieurs exemples démontrent que la désignation d’un Expert indépendant au Congo-Kinshasa relève de l’urgence absolue pour appuyer l’excellent travail réalisé sur le terrain par les activistes de la Société civile. Il s’agit de porter à la connaissance de la "communauté internationale" de la montée en puissance de l’intolérance politique. Une intolérance qui prend des allures préoccupantes au fur à mesure que l’on se rapproche de la date d’expiration du second et dernier mandat du président sortant.

"Opération Likofi" et "fosse commune" de Maluku

L’opinion congolaise attend depuis 2013 que le pouvoir kabiliste fasse toute la clarté sur les accusations portés contre lui tant par le Bureau de la Division des droits de l’Homme de la Monusco que l’Ong Human Right Watch. En cause, les exécutions extrajudiciaires imputables à des éléments de la police nationale, le visage camouflé par des cagoules, lors de l’opération "Likofi". HRW a fait état de 51 exécutions extrajudiciaires et de 33 disparitions forcées documentées par l’organisation non gouvernementale.

Que dire de l’affaire de la "fosse commune" de Maluku? Cette affaire embarrasse le pouvoir kaniliste au plus haut point. Le propriétaire d’un champ situé à côté du cimetière Fula Fula a déclaré que le 19 mars vers 5h00 du matin, il a vu un gros camion à benne et des hommes qui pelletaient de la terre à la limite du cimetière. Quand il est retourné à son domicile ce matin-là, des hommes qui lui ont paru appartenir aux services de renseignement l’ont accosté et lui ont demandé ce qu’il avait vu au cimetière.

Des familles craignaient que cette "tombe commune", dixit Alexis Thambwe, ne contienne les cadavres de victimes des forces de sécurité lors des manifestations de janvier dernier dans la capitale. Les organisations de défense des droits humains dont HRW ont invité les autorités congolaises à procéder à l’exhumation des corps enterrés. La demande est restée sans suite à ce jour.

Signe de la montée en puissance de l’intolérance autant que de la ruse politique, plusieurs acteurs politiques et ceux de la société civile croupissent dans divers lieux de détention. Des noms sont connus : Eugène Diomi Ndongala (Démocratie chrétienne), Jean-Claude Muyambo Kyassa (Scode), Vano Kiboko (Lwanzo lwa Mikuba), Ernest Kyaviro (UNC).

Que dirent de la détention sans jugement des activistes de la société civile Christopher Ngoyi Mutamba, président de la Coordination de «Synergie Congo Culture et Développement» (SCCD) et des jeunes Fred Bahuma et Yves Makwambala de la "Lutte pour le changement" (Lucha)? Ces deux derniers sont accusés, sans rire, de "complot contre la vie et la personne du chef de l’Etat".

"Culture de la gâchette facile"

En février 2010, Floribert Chebeya Bahizire, alors directeur exécutif de "La Voix des Sans Voix pour les droits de l’Homme" (VSV), a bataillé à Genève afin d’obtenir la désignation d’un Expert indépendant au Congo-Kinshasa. En vain. "La situation des droits de l’Homme est devenue pire qu’avant, disait-il. Les nouveaux maîtres du pays ont amené la culture de la gâchette facile". Le 2 juin de la même année, on retrouvait le corps sans vie de "Floribert" sur la banquette arrière de sa voiture. Son compagnon d’infortune, Fidèle Bazana, n’a plus jamais été revu. Ils s’étaient rendus la veille à un rendez-vous avec le patron de la police nationale, le "général" John Numbi Banza.

Pour la petite histoire, fin 1996, l’AFDL (Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo-Zaïre) qui a porté Laurent-Désiré Kabila au pouvoir, un certain 17 mai 1997, a usé abondamment du rapport rédigé par le rapporteur spécial Roberto Garreton sur l’état des droits de l’Homme au Zaïre de Mobutu Sese Seko. L’AFDL utilisa ce document pour justifier son "combat".
Question : dans quel pays vit le ministre Alexis Thambwe Mwamba?
 
 
B.A.W
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