Friday, 30 October 2015

La République démocratique du Congo envisage d’affaiblir les réglementations destinées à éliminer la corruption minière

La République démocratique du Congo envisage d’affaiblir les réglementations destinées à éliminer la corruption minière


30/10/2015

DRC Ruashi mine

Global Witness a aujourd’hui prévenu que la République démocratique du Congo envisageait de supprimer des réglementations cruciales qui interdisent aux décideurs politiques et aux hauts gradés de l’armée de détenir des droits miniers, à l’heure où des dirigeants d’entreprises et des agents du gouvernement se réunissent à Kinshasa pour parler du secteur minier.

Pour l’instant, la suppression de ces modalités essentielles pour lutter contre les conflits d’intérêt n’a guère été relevée mais, conjuguée à des dispositions extrêmement laxistes sur la transparence, elle pourrait rendre le secteur minier congolais plus vulnérable à la conclusion de contrats corrompus et coûter des milliards de dollars au pays. Le changement proposé fait partie des amendements au Code minier de 2002 que le Gouvernement a présentés au Parlement en mars et que Global Witness a publiés.

"Cela fait trop longtemps que le secteur minier de la RDC est à la merci des politiciens et hommes d’affaires qui cherchent à l’exploiter . Le fait de tenter de supprimer les dispositions relatives aux conflits d’intérêt facilitera la conclusion de contrats douteux qui privent le Trésor congolais de milliards de dollars. Le Congo ne peut se permettre de passer à côté d’une opportunité de renforcer ses réglementations pour que sa population bénéficie de la richesse minérale du pays." - Nathaniel Dyer, chef de l’équipe en charge du Congo à Global Witness.

Le processus de révision du Code minier, qui traîne en longueur depuis plus de trois ans, est fortement entravé par des différends entre les intérêts du gouvernement, du secteur privé et de la société civile. Si ce retard est inquiétant, les faiblesses qui persistent dans la nouvelle proposition de législation – ou qui y ont été introduites – le sont encore plus. D’après l’analyse de Global Witness:

  • Les garanties relatives aux conflits d’intérêt ont été supprimées ;
  • Il n’existe aucune disposition spécifique ayant trait à la publication des contrats ;
  • Le processus d’appel d’offres n’est pas assez transparent et ne fait pas l’objet de contrôles suffisants, un trop grand pouvoir discrétionnaire étant laissé au ministre des Mines ;
  • Les entreprises publiques se retrouvent largement non réglementées ;
  • Des exigences claires et rigoureuses concernant la divulgation de l’identité des propriétaires réels sont requises ;
  • Aucun article ne traite spécifiquement de la prévention du financement du conflit et de l’implication de l’armée dans le commerce des minerais.
La révision du Code, qui n’a pas encore été présentée, offre une occasion rare de supprimer les échappatoires majeures que comporte la législation actuelle. D’après les estimations, des accords miniers secrets auraient ces dernières années coûté au Congo au moins 1,36 milliard de dollars – soit le double des dépenses annuelles de santé et d’éducation du pays. L’inadéquation de la gouvernance et de la transparence dans le secteur minier augmente le risque que des élites politiques corrompues ne tirent un bénéfice personnel des actifs de leur pays, tandis que, dans l’est du pays, des groupes armés et des membres de l’armée sont parvenus à financer leurs activités grâce au secteur minier artisanal.

Global Witness demande à ce que la nouvelle législation permette de disposer d’informations supplémentaires sur le secteur minier industriel, empêche les personnes politiquement exposées de profiter de l’activité minière, divulgue l’identité des propriétaires réels des droits miniers et mette un terme au transport, au trafic et à la vente de minerais par des hommes armés, des militaires et des fonctionnaires provinciaux.

« Kinshasa accueille cette semaine la conférence Mines et Infrastructures de l’IPAD, qui invite les participants à ‘Puiser dans 24 000 milliards de dollars de réserves minérales au cœur de la RDC’. La richesse minière ne devrait pas servir à remplir les poches des élites, qu’il s’agisse d’hommes d’affaires, de représentants d’entreprises ou d’hommes politiques ; elle devrait permettre de financer les écoles, les hôpitaux et les routes dont le Congo a tant besoin », a ajouté Nathaniel Dyer.

Le secteur minier congolais, s’il faisait l’objet d’une gestion rigoureuse, pourrait contribuer à sortir le pays de la pauvreté. En effet, bien que la RDC occupe l’avant-dernière place de l’Indice de développement humain de l’ONU, elle est devenue le premier producteur africain de cuivre en 2014, et son activité minière a rapporté plus de 1,3 milliard de dollars au Trésor congolais en 2013, d’après l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives.

Nathaniel Dyer, Campaign Leader, Democratic Republic of Congo
Global Witness
 

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